Par Maître GREBILLE-ROMAND

Charge de la preuve et contradictoire en droit routier 

 

En matière pénale, la charge de la preuve est expressément liée à la présomption d’innocence du prévenu, laquelle a été érigée en principe à valeur constitutionnelle par le Conseil Constitutionnel (Cons. const. 20 janv. 1981, n° 80-127 DC, sécurité et liberté).

En matière civile, c’est à la partie qui allègue un fait qui doit en apporter la preuve conformément à l’article 1353 du Code civil.  

Ainsi, la répartition de la charge de la preuve permet au juge de veiller au respect du principe du contradictoire, traduction concrète du droit à un procès équitable.

Récemment, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu un arrêt intéressant en matière de charge de la preuve en droit pénal routier (Crim., 3 octobre 2023, n°23-80.914).

Précisément, dans cette affaire, un véhicule a fait l’objet d’une verbalisation sans que soit interpellé le conducteur du véhicule.

Le titulaire du véhicule en cause a alors été cité devant le tribunal de police et a soutenu que son véhicule avait été prêté à une tierce personne au moment de l’infraction, sans pour autant dénoncer l’individu.

Le juge du tribunal de police a alors considéré que le prévenu n’avait pas rapporté la preuve contraire aux constatations du procès-verbal de contravention.

Le 3 octobre 2023, la chambre criminelle de la Cour de cassation a retenu que le juge avait fait cette conclusion à tort, dès lors que l’identité de l’auteur de l’infraction ne ressortait d’aucune constatation policière.

De la sorte, le juge suprême vient préciser les modalités de la charge de la preuve en droit pénal routier.

Concernant la preuve d’un sinistre en matière civile, la Cour de cassation a rendu une autre décision importante le 21 septembre 2023 (Civ. 2, 21 septembre 2023, n°22-10.698).

Ici, un assureur automobile avait refusé de garantir le véhicule de la requérante en se basant sur une déclaration erronée de cette dernière.

Le jugement du tribunal judiciaire de Paris avait fait droit au refus de garantie de l’assureur en se basant sur la réalisation d’une expertise amiable initiée par une des parties.

Ainsi, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt du tribunal de Paris en ce qu’il se fonde exclusivement sur une expertise non-judiciaire réalisée à la demande d’une des parties.

En statuant ainsi, la Cour de cassation veille à garantir le respect du principe du contradictoire.